Pour un binôme Manager RH plus riche et plus fluide

Qu’est-ce que les managers attendent des RH ?  

RH et managers sont les relais de la stratégie de l’entreprise. La stratégie RH est le relais de la stratégie de l’entreprise, les managers sont les relais de la stratégie RH.

Chaque manager attend quelque chose de différent de son RH et cela dépend de son contexte, mais souvent le rôle du RH est perçu comme étant là pour soutenir le manager dans son rôle de manager, tout en étant le garant du cadre complexe législatif, et du dialogue social. Ainsi, le manager attend de l’expertise humaine.

Mais de façon caricaturale, les managers attendent à la fois « tout » et « rien » du RH. Souvent le manager attend que le RH solutionne tous les problèmes humains que lui-même n’a pas pu solutionner. Mais en retour, le RH supporte souvent les maux / mots « c’est de la faute des RH ». 

Or, la place, la qualité de la relation du binôme RH/Manager est clé dans l’entreprise puisque c’est LE binôme qui a la charge de l’être humain.


Qu’est-ce que les RH attendent des managers ? 

D’une façon également caricaturale, les RH attendent d’être écoutés par les managers. Les RH ont un rôle central, mais souvent caché et « derrière ». Un certain nombre de leurs préconisations ne sont pas toujours entendues ou alors ils sont perçus comme des « empêcheurs de tourner en rond » par les managers. 

Je pense que les RH attendent une forme de respect, au sens de la mise en place d’une relation partenariale.

Cela dans le but de pouvoir réellement apporter leur valeur ajoutée, à savoir permettre aux managers d’être la quintessence de l’accompagnement humain grâce à leur expertise. 


Qu’est-ce qui peut coincer dans la relation manager – RH ? 

Ce qui rend difficile cette relation, c’est qu’à un moment donné, les enjeux des managers et des RH peuvent être contradictoires. Ils n’y peuvent rien. C’est factuel. Et dans ce cas la relation partenariale est malmenée. 

Par exemple, le manager va être sur un temps plutôt court, opérationnel. Le RH lui doit se conformer au « temps juridique », les contraintes juridiques l’empêchent de dire les choses ou d’accélérer certaines procédures. 

Ou, le manager n’a pas la perception que le RH comprend ses enjeux opérationnels. En effet, le RH peut parfois manquer d’une culture terrain, au même titre que le manager peut ne pas entendre les enjeux légaux ou de relations sociales ou humaines.

Ça coince, lorsqu’il n’y a pas eu de rencontre, de partage, de compréhension des rôles et des contraintes de l’un et de l’autre, et de ce en quoi ces métiers se co-soutiennent. Que l’on soit manager de proximité ou grand dirigeant, et que l’on soit RH opérationnel ou DRH, il y a une complémentarité, une rencontre à réaliser.

C’est main dans la main que ces deux fonctions doivent avancer pour apporter leur valeur à l’individu, être humain, sujet, à l’intérieur de l’entreprise


Comment faire pour que les hommes, les femmes de ces fonctions se rencontrent et arrivent à se comprendre, à travailler ensemble ? 

Tout d’abord, c’est l’organisation qui doit reconnaître et placer la fonction RH comme une fonction business partner.

La fonction RH fait partie des fonctions dites « support », mais cela ne veut pas dire que c’est une fonction « centre de coûts/coups » qui « empêche le business de tourner » et qui doit être instrumentalisée par la fonction opérationnelle business qui « ramène l’argent » et qui dit au RH « y a qu’a, faut qu’on ». 

Au même titre que les RH n’ont pas, sous prétexte qu’ils sont fonction support, experts et sachants, à donner la perception qu’ils ne se mettent pas en mouvement rapidement pour répondre aux besoins et contraintes opérationnelles. 

Celle culture de business partner est importante et c’est à la structure, au cadre de repositionner cet équilibre des forces.
Derrière la notion de business partner, il y a la notion du « ensemble ». Ce n’est pas l’un au-dessus de l’autre ou l’autre en dessous de l’un. 

Après, au-delà de ce cadre, c’est une histoire de rencontre d’individus. 

C’est tout d’abord une ouverture réciproque, une compréhension de la valeur ajoutée du service, de ce que permet le service RH aux opérationnels, et vice versa. 

Puis c’est organiser le maximum de rencontres possibles, comme des définitions d’objectifs communs, des parcours de formation commune ou des réflexions communes, de manière à ce que les uns et les autres apprennent à travailler ensemble. 

Par exemple, dans le contexte tendu de recrutement, une fiche de poste se co-construit. Un choix de cabinet ou de cible de recrutement se co-construit. C’est en partenariat qu’on cherche ou pas le « mouton à cinq pattes » et qu’on s’ajuste. L’un n’empêchant pas l’autre de réussir. Les 2 parties sont en alliance face à une situation complexe de recrutement. 

Comment y arriver ensemble ? Que ce soit pour la posture durant les entretiens, la réactivité dans les agendas (tant RH qu’opérationnels), l’image marketing employeur, le parcours d’intégration pour ajuster le différentiel de compétences entre celles qui existent sur le marché et celles qu’on recherche, tous ces sujets sont une réflexion collective qui n’est possible que parce qu’il y a une reconnaissance et une valorisation mutuelle de la place et du rôle de chacun et de la valeur ajoutée de chacun. 

Cela n’est possible que parce qu’il y a de la collaboration, de l’empathie, un feedback sur ce qui fonctionne, dysfonctionne, c’est-à-dire une relation de qualité.  
À la base de toute collaboration, il y a la confiance et à la base de confiance, il y a le respect et une relation qui s’entretient dans les deux sens.

Dans toutes les entreprises les relations partenariales sont clés, mais les RH ont un grand enjeu, c’est avec l’ensemble des fonctions qu’elles doivent être en partenariat et avec l’ensemble des niveaux hiérarchiques.


Les RH vont devoir monter en compétences pour intégrer les évolutions induites par l’IA. Quelle évolution dans la relation avec les managers ?

Grâce à l’intelligence artificielle, nous allons tous monter d’un cran dans nos expertises. 

Coté RH, par exemple, les réponses aux questions sur les congés ou les réponses aux questions sur « comment je fais dans telle situation ? », vont pouvoir être apportées par une IA qui pourra faire un premier niveau de service, de réponse.

Sans compter que les RH vont devoir accompagner aussi l’ensemble de l’entreprise et ses managers sur leur montée en compétence, en plus de la leur.

Cela veut dire que l’être humain doit monter au deuxième ou au troisième niveau de service, ce qu’un certain nombre de RH sont en train d’organiser ou ont déjà mis en place. 

Et ce niveau de service nécessite de remonter d’un cran sur le niveau de relation et de collaboration avec l’équipe managériale. Ainsi, il est important de s’assurer que cette relation se situe bien à un niveau partenarial et non à un niveau instrumentalisé de part et d’autre. 


Plus globalement, la fonction RH connaît beaucoup d’évolutions, les RH ne sont pas moins fatigués que les managers. Quelles précautions sont à prendre ? 

Effectivement, plus globalement, la fonction RH reflète l’évolution des changements sociaux et économiques du pays. Il y a un siècle la fonction RH c’était de l’administration du personnel où « on comptait les gens ». Puis il y a eu l’évolution de la législation du travail et du dialogue social, puis la préoccupation autour du développement des compétences et du bien-être. Maintenant, il y a l’intégration de l’intelligence artificielle. Mais il y a aussi l’intégration des notions d’inclusion, de diversité, de santé mentale, de flex office, de la semaine de 4 jours…

Bref, dès qu’il y a une évolution sociétale, ceux qui sont en première ligne ce sont les RH et on attend d’eux qu’ils soient déjà experts alors qu’eux-mêmes sont pris dans le tourbillon.

Donc, la prise de hauteur et l’adaptabilité dans la fonction RH est critique mais il y a aussi beaucoup de tolérance à avoir vis-à-vis de cette fonction pour lui laisser le temps de monter en compétence et d’analyser ces nouveautés.

Sans oublier, quand dans la fonction RH, il y a aussi le dialogue social et l’embarquement des IRP. Tout cela est extrêmement complexe.

Il faut aussi entendre qu’actuellement, la fonction RH est elle aussi fatiguée. Elle doit apprendre à prendre soin d’elle au même titre qu’elle prend soin des autres.

Et dans ce contexte, il est important que les managers soient en ouverture vis-à-vis de cette fonction RH et en soutien pour accueillir ses réflexions, son positionnement, ses mises en garde, son questionnement dans un but de valeur ajoutée long terme.  


Que va permettre la constitution d’une relation de qualité dans le binôme manager-RH ? 

Dans de nombreuses situations, comme une difficulté personnelle dans le cadre professionnel ou des tensions conflictuelles ou des problèmes de charge de travail dans leurs équipesles managers ne peuvent pas agir seuls. Ils ont besoin d’un tiers extérieur qui les aide à prendre de la hauteur sur ces situations. Ce sont souvent les RH qui jouent ce rôle de tiers.

Pour pouvoir oser demander de l’aide à l’autre, et à son RH, la relation de confiance, de partenariat est clé pour installer un contexte de sécurité psychologique.

Et ça dépend du profil du manager, ça dépend du profil du RH. Il y a une rencontre à réaliser et cette rencontre, chacun en est responsable. C’est important de pouvoir parler de sa qualité relationnelle, de pouvoir se dire quels sont les attendus de l’un de l’autre, de savoir où on est d’accord et où ou ne l’’est pas. 

S’il est en confiance, le manager en difficulté se tournera naturellement vers son partenaire RH qui, à ce moment-là, sera légitime à ses yeux pour pouvoir l’aider à prendre de la hauteur et à prendre du recul.

Au même titre, que s’il y a une relation de confiance, le RH se sentira légitime d’interpeller le manager s’il observe des prises de décision qui, à court terme, font sens pour l’équipe parce par exemple « il faut à tout prix nommer quelqu’un et qu’il y a que untel qui est disponible », mais qu’à moyen terme ces décisions peuvent avoir des conséquences sur la motivation et la dynamique collective de l’équipe, sur un parcours de carrière, etc. 

Ces temps de prise de recul, ces gestions du temps court/long, les contraintes légales, les résistances au changement, font que parfois « des choses dont le manager rêve peuvent ne pas arriver » ou que « des recommandations des RH ne sont pas prises en compte ». Et cela peut « mettre des cailloux dans le tuyau de la relation ». 

Dans de telles situations, une relation de « binôme » partenariale, respectueuse permet de se dire les choses de façon constructive et assertive pour ensemble trouver une solution, en utilisant les principes de reformulation et de compréhension du point de vue de l’autre, tout en exprimant ses propres limites et besoins.


Qu’est-ce qu’il serait bon de s’approprier dans cette relation pour qu’elle soit fluide et qu’elle s’enrichisse ?

Il faut s’approprier le plaisir comme dans toute relation ! C’est-à-dire le plaisir de travailler ensemble. 

S’approprier la reconnaissance de la valeur ajoutée que chacun a, s’approprier de l’empathie, du soutien, de l’encouragement réciproque parce que tout le monde est dans la même aventure.

S’approprier ce plaisir de travailler ensemble, au-delà de la fonction, et ainsi considérer qu’on est tous des joueurs de la même équipe et qu’il n’y en a pas un qui joue contre le camp de l’autre. On a des positions différentes, il y en a qui sont peut-être attaquants et d’autres défenseurs, mais il faut les deux sur le terrain ????.


Les clés d’Ajadi

Pour enrichir la fluidité du binôme Manager-RH, tout est question de respect de part et d’autre.

Les clés sont : 

  • Asseoir la légitimité de la fonction RH comme business partner
  • Reconnaître la valeur ajoutée réciproque et complémentaire
  • Organiser des temps de rencontre et de partage communs
  • Avoir conscience et respecter les enjeux et contraintes parfois contraires des fonctions
  • Développer et entretenir une qualité relationnelle via la prise de recul, l’assertivité, l’empathie et le soutien
  • Avoir plaisir à jouer dans la même équipe et oser s’entraider

Cet article est issu du podcast « Les Pratiques du Management », durant lequel Aurélie Durand répond, chaque mois, aux questions de Frédérique Roseau, Rédactrice en Chef à la Revue Fiduciaire.

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