Qu’est-ce qui rend difficile de travailler avec d’autres équipes ?
Ce qui rend les choses difficiles quand on travaille avec d’autres équipes, c’est tout simplement le fait que nous sommes tous différents !
Cette difficulté est variable en fonction de l’alignement des objectifs entre les 2 équipes, « poursuit-on le même but ? » et des personnalités des individus dans les équipes.
Les causes des difficultés sont donc à la fois structurelles et relationnelles, et c’est plus ou moins difficile de travailler avec d’autres équipes en fonction de cet alignement.
Est-ce que le fait de travailler en hybride avec du télétravail peut renforcer cette difficulté ?
En télétravail, en hybride, nos relations peuvent devenir plus transactionnelles. C’est-à-dire que la relation peut ne pas avoir été développée ou ne pas être entretenue.
Si nous prenons le temps de développer et d’entretenir une relation – c’est-à-dire d’aller à la rencontre de l’autre en s’intéressant à qui il est derrière sa carte de visite, à ce qui compte pour lui, ses valeurs, ce qui est important pour lui en ce moment – nous tissons un lien entre nous 2, ce qui permettra plus facilement de discuter de nos désaccords et de nous aligner
Si l’autre est juste un nom, une voix derrière la visio ou le téléphone, nous sommes uniquement transactionnels, comme des robots.
Si nous sommes uniquement transactionnels, cela sera plus difficile de jouer collectif avec des objectifs désalignés, comme par exemple quand un service est focus CA, quand l’autre est focus rentabilité. En effet, il sera difficile de dialoguer d’échanger dans le tuyau de la relation sur ce que les uns font pour atteindre leurs objectifs business, ce qui pose un problème aux autres service et vice versa. La relation entre les 2 services se crispera.
Il est donc important de faire l’effort d’aller à la rencontre de l’autre, de comprendre son point de vue, ses contraintes, ses objectifs.
Chaque individu, chaque équipe a des objectifs singuliers, comment poursuivre un objectif commun ?
Tout d’abord, n’oublions pas que l’objectif commun c’est que l’entreprise perdure. Et en ça nous sommes tous co-responsables.
Les objectifs d’équipes peuvent donner la perception d’être antagonistes. Mais cela peut aussi être créateur de valeur. Un objectif de CA n’est pas forcément à opposer à un objectif de rentabilité.
La 1re étape est d’accepter cette contrainte d’objectif business à angle droit et de ne pas se battre contre. C’est accepter et décider de prendre cette contrainte comme une tension créatrice de valeur, c’est accepter de ne pas raisonner en « blanc ou noir », « l’un contre l’autre », « le CA contre la rentabilité ». C’est raisonner dans une approche « win-win » : « comment on y arrive ensemble ? ».
Face à une contrainte structurelle, classique en entreprise, c’est l’ouverture, l’intelligence relationnelle et collective qui permettent de créer de la valeur.
Cela nécessite de se questionner et reconnaitre l’apport et la complémentarité de valeur ajoutée de chaque équipe à l’objectif final commun.
Ainsi plutôt que de fixer des objectifs business à chaque service, de façon très descendante, sans toujours analyser leur compatibilité, dans une méthodologie dite « objectifs SMART » (Spécifiques, Mesurables, Atteignables, Réalistes, Timés), la méthodologie des « objectifs OKR » (Objectives Key Results), permet de prendre plus de hauteur de vue en fixant des objectifs globaux et de définir les indicateurs de performance de chaque équipe « par remontée » où chaque équipe se questionne sur les résultats qu’elle doit atteindre pour contribuer à la feuille de route collective.
Structurer un cadre qui déplace le débat sur la valeur ajoutée et la complémentarité facilite le dialogue entre les équipes qui seront moins en compétition sur des objectifs contradictoires.
Que peut faire un manager d’équipe pour faciliter les interactions avec les autres équipes ?
Tout d’abord, le manager n’est pas seul responsable du cadre du jeu collectif, cela dépend également des managers des autres équipes et de la culture globale de l’entreprise.
Mais pour favoriser les interactions avec les autres équipes, il est nécessaire que l’esprit d’équipe, le jeu collectif, la cohésion au sein de sa propre équipe soient favorisés.
Le manager doit pouvoir permettre le développement d’un état d’esprit « Win Win », de collaboration, sans gagnant ou perdant, sans compétition, avec un questionnement du type : « Comment réussissons-nous ensemble ? « Comment pouvons-nous collaborer vers ce but commun ? ». C’est-à-dire avec cette intelligence collective où les acteurs ne se focussent pas sur le problème à résoudre, mais font preuve d’ouverture pour répondre ensemble à une question, une préoccupation qui est leur but commun, en acceptant qu’il peut y avoir différentes manières de répondre à cette question commune, différents angles d’attaques, différentes stratégies.
Et au niveau de chaque interface, au sein de son équipe, mais aussi avec les autres équipes, le manager peut mettre en lumière l’importance d’entretenir le dialogue, de pratiquer le feedback, de comprendre les modes de fonctionnement et réactions différentes des uns et des autres.
Pour ce faire, il est clé d’autoriser le droit à l’erreur, avec la culture de l’amélioration continue et des retours d’expérience pour des ajustements perpétuels aux interfaces. Il est également clé de respecter et faire respecter le cadre, c’est à dire des rôles & responsabilités des uns et des autres, de ne pas faire à la place de l’autre.
A quels niveaux réaliser des points sur la qualité des interactions avec les autres équipes ?
Les tensions entre les équipes sont normales, nous sommes tous différents, et ce sont ces différences qui stimulent la créativité.
Comme ce ne sont pas les process, la structure, les objectifs qui vont tout régler. Comme il n’est pas possible de tout codifier, tout préparer, tout anticiper, c’est le dialogue, la rencontre, l’alignement qui permettent de fluidifier les interfaces.
Cet alignement doit se réaliser tant au niveau des équipes qu’au niveau de chaque membre de l’équipe dans ses interactions avec chacun des autres membres des autres équipes avec lesquels il est en interaction. C’est à chacun de se poser la question de la fluidité et de la qualité de ses interfaces.
Et dans son rôle d’exemplarité, le manager doit pouvoir aussi illustrer ce jeu collectif avec ses pairs. Ainsi c’est aussi à son n+1 de s’assurer qu’il n’y a pas de jeu d’ego mal positionné entre les différents services.
Les clés d’Ajadi :
Travailler efficacement avec d’autres équipes c’est répondre à la question « Comment va-t-on réussir ensemble ? ». Cela nécessite de mettre en place les ingrédients de la collaboration :
- S’aligner sur un objectif commun, une problématique à résoudre en collectif, au-delà d’un résultat opérationnel à atteindre
- Accepter que les objectifs puissent être antagonistes et créateurs de valeur, qu’il est normal de ne pas être d’accord et qu’il n’y a pas LA bonne solution, mais DES solutions
- Se questionner et tirer profit de la complémentarité de valeur ajoutée, respecter les rôles et responsabilité de chaque service
- Installer une culture de la relation, c’est-à-dire de l’ouverture, du dialogue, du feedback
- Structurer et faire respecter un cadre (rituels et méthodologie) d’intelligence collective qui permet d’entretenir la fluidité des interfaces
Cet article est issu du podcast « Les Pratiques du Management », durant lequel Aurélie Durand répond chaque mois aux questions de Frédérique Roseau, Rédactrice en Chef à la Revue Fiduciaire.