Dans une période de pénurie de ressources, est ce que les recruteurs ne s’épuisent pas en vain à essayer de recruter ?
Il est sûr que sur certaines fonctions comme le digital ou la RSE, dans certaines activités comme l’Hotellerie Restauration ou l’industrie, ou dans certains bassins d’emplois, il est nécessaire de lâcher prise, de changer de stratégie car la tension est là, sur le marché.
Et, les causes d’une difficulté de recrutement sont multiples, et elles peuvent être exogènes à l’entreprise, au dirigeant, comme nous l’évoquions précédemment, mais les solutions sont forcément endogènes à l’entreprise.
Comment procéder face à des causes exogènes ?
Il faut les accepter. Ce n’est pas en refaisant toujours la même chose qu’on obtient un résultat différent. Vous pouvez vous en agacer pour libérer la charge émotionnelle associée, mais une fois « le coup de gueule » passé, ne tombez pas dans l’action d’insister à tout prix ou dans un repli défaitiste.
Nous avons toujours les moyens de créer de la valeur dans un système contraint.
Mais cela demande de changer son regard sur la situation, d’oser des voies inexplorées, de s’inspirer d’autres secteurs, entreprises, en clair cela demande de s’adapter.
Et cela n’est pas toujours évident !
Il est important de faire différemment de d’habitude, cela demande une réflexion, une préparation, des essais-erreurs et donc un effort pour un retour sur investissement non garanti !
Le dirigeant et l’équipe doivent donc accepter que compte tenu des contraintes exogènes, pour atteindre leur but, il va falloir prendre le temps de faire différemment, malgré la pression et l’urgence.
Pour ce faire, le dirigeant doit s’assurer qu’il a besoin de recruter et qu’il a bien posé les bases de son recrutement.
Comment bien poser les bases de son recrutement ?
La 1ère étape est de bien analyser la situation : le profil existe mais ne veut pas venir ? Le profil vient mais ne reste pas ? Ou le profil n’existe pas ou est trop junior, trop senior, pas assez ci ou ça ?
En fonction, vous ne jouerez pas sur les mêmes leviers de créativité, d’adaptation.
-Soit, vous devrez agir sur l’attractivité, l’expérience collaborateur,
-Soit, vous devrez renoncer à certains critères à CT et prévoir de former le candidat pour pouvoir développer ce profil idéal à MT,
-Ou alors vous devrez revoir votre analyse de poste dans une vision plus globale, c’est-à-dire en réorganisant les rôles et responsabilités au sein de l’équipe,
-Ou en réalisant une mobilité et montée en compétence sur le poste de quelqu’un en interne, pour lequel il sera plus facile de trouver un candidat en externe.
Réussir un recrutement c’est un tout, ce n’est pas juste un process qui se conclut par une signature de contrat de travail !
Réussir un recrutement, cela nécessite une analyse holistique de la situation, une attention au candidat mais également à l’équipe en place, une préparation et un suivi.
Comment réagir face à des échecs de recrutement ?
Il y a souvent des dirigeants qui disent : « j’en ai marre, j’en suis à 3 recrutements qui sont des échecs ». Soit la personne part, soit la personne n’est pas à la hauteur de leurs attentes.
Face à un échec il faut analyser la cause. Et pour cela, le dirigeant doit être en capacité d’être objectif sur son objectivité durant le processus du recrutement.
S’est- il précipité ? A-t-il bien déterminé ce qu’il attendait en soft skills, valeurs au-delà des hards skills ? A-t-il levé tous les doutes, les siens, ceux du candidat ? A-t-il été transparent sur la réalité du poste ? Le candidat s’est-il senti accueilli par l’équipe ? A-t-il bien mesuré les enjeux de son poste ? Ses motivations sont-elles saines ? L’équipe a-t-elle été associée au recrutement, à l’intégration ? Le nouveau recruté a-t-il eu les moyens de s’intégrer sereinement ? A-t-il reçu l’accompagnement nécessaire ?
Dans une période de pénurie de ressources, le candidat est rare, donc extrêmement sollicité et du coup plus volatile, car sujet à une surenchère de rémunération ou des conditions de travail plus avantageuses à la concurrence. Donc encore plus qu’en temps normal, il est nécessaire de soigner son processus de recrutement.
C’est-à-dire faire preuve d’attention au candidat, à l’équipe à chaque étape ; et accepter de changer parfois certains paramètres.
Cette analyse sur l’ensemble des axes est clé pour éviter d’en arriver à des échecs répétitifs.
Qu’est ce qui fait la quintessence d’un recrutement ?
Pour aller plus loin, ce qui permettra réellement d’éviter un nouvel échec, c’est de changer d’approche, c’est-à-dire en plus de cette analyse, d’envisager le recrutement comme une rencontre sincère.
Il est courant d’entendre les dirigeants dire : « il n’est pas comme je le pensais », ou des collaborateurs « ce n’est pas ce qu’on m’avait promis ».
Il important de se demander: est-ce que la promesse est différente de la réalité ? Et nous parlons de la promesse faite au candidat comme celle qu’il a réalisé à l’entreprise.
Ou est-ce la compréhension que chacun avait de la promesse qui est différente ?
On peut utiliser les mêmes mots, sans y mettre la même signification.
N’oublions pas, que dans le recrutement il a souvent un jeu de séduction qui s’installe de part et d’autre. Cependant, ce jeu de séduction est piégeant car s’il n’est pas sincère, il peut être désillusionnant à moyen terme. Et nous avons chacun, candidat comme entreprise, notre part de responsabilité. A vouloir être trop attractif on peut fausser la réalité.
Il est important de rappeler que, dans un process de recrutement, ce qui compte c’est que chacun reste authentique et objectif.
Si la rencontre ne doit pas se faire, cela ne sert à rien de la forcer, à moyen terme il y aura séparation qui, in fine coutera cher à l’entreprise et au candidat. Il vaut mieux ne pas s’engager.
Envisageons une réflexion psycho de magazine, mais qu’est ce qui fait qu’un couple s’épanouit ? Je vous laisse y penser et appliquer les principes d’authenticité, de respect, d’ouverture à l’autre, de qualité relationnelle et d’inclusion de l’environnement qui surement vous viendront à l’esprit !
En période de pénurie, cela ne sert à rien de se précipiter ou de faire monter les enchères ! Il faut prendre le temps, être congruent dans ses actes avec l’image employeur qu’on cherche à renvoyer, être objectif sur ce que chacun peut apporter à l’autre, dialoguer pour s’ajuster sur les attendus réciproques, définir les plans d’actions d’ajustement, préparer l’accueil et accompagner l’évolution.
L’objectif est le succès sur la durée et non uniquement le succès de la signature du contrat de travail.
Quels risques vis à vis de l’équipe à “séduire” ou “faire monter enchères” pour recruter un candidat ?
Il est tentant de faire une surenchère pour attirer le candidat !
Cela permettra de signer le contrat, mais encore une fois, cela ne garantira pas que le candidat reste. Et ces choix peuvent en plus avoir un impact sur l’équipe.
C’est pour ça que l’analyse doit être holistique.
Il s’agit de raisonner en fonction du marché, mais aussi en fonction de l’interne ; de prendre ses décisions en conscience des conséquences qu’elles auront sur toutes les dimensions du système à court terme et moyen terme ; c’est-à-dire en prenant en compte à la fois les spécificités du candidat mais aussi les règles internes et l’équipe.
Et pour sortir de l’ornière, raisonner équité plus qu’égalité.
Par exemple, pour les avantages accordés, la règle peut ne pas être la même pour tous, à condition que chacun se sente respecté dans ses besoins pour être efficace et performant sur la durée.
C’est prendre en compte les spécificités individuelles pour un résultat équitable.
Pour arriver à cela, transparence et dialogue avec l’équipe en place sont nécessaires pour lui permettre de comprendre la finalité des choix.
Recruter c’est intégrer dans un système un nouvel élément, que ce soit un remplacement ou une création de poste. Et quand on change un élément d’un système, on bouge tout le système. Pour garantir la réussite d’un recrutement, la préparation et l’accompagnement de l’intégration est clé, tant vis-à-vis du candidat que vis-à-vis de l’équipe.
Nous recherchons souvent quelqu’un opérationnel de suite, mais cela n’est pas possible. Du coup, le temps d’apprentissage est également à prendre en compte au niveau de l’équipe qui va devoir se charger de la montée en compétence in situ et qui pendant ce temps verra sa charge de travail déséquilibrée.
C’est pourquoi, l’équipe doit être associée, c’est à dire être consciente des contraintes exogènes et être associée à la réflexion de comment faire pour attirer, intégrer et fidéliser un nouveau membre.
Comment procéder, en ce qui concerne l’attractivité ?
Le réseau, la cooptation par les salariés est un des meilleurs sourcing de recrutement, c’est pour cela qu’associer l’équipe est clé.
En fait, la notion d’attractivité rejoint la notion de fidélisation et d’expérience collaborateur.
Les réponses les plus appropriées en termes d’expérience collaborateur viennent de ce que l’équipe vit elle-même ; et si cette expérience n’est pas optimale, il est fort possible que le candidat ne reste pas sur la durée.
Donc cette problématique de recrutement est l’occasion d’installer une nouvelle dynamique collective.
Et tout candidat qui a connaissance de l’offre par un site d’emploi, un cabinet de recrutement ira mener son enquête.
Les plateformes de notation de leur entreprise par les salariés sont nombreuses pour permettre au candidat de vérifier que les valeurs, conditions de travail et opportunités promises en entretien sont bien réelles.
Les clés d’Ajadi
Pour soigner son process recrutement : définir le poste, c’est-à-dire soigner : sourcing, sélection, pré on-boarding, on-boarding, intégration …. voici 6 clés :
- Analyser la situation et accepter les éléments exogènes.
- Changer des paramètres pour ouvrir le champ des possibles.
- Associer l’équipe au processus.
- Être vigilant à avoir une vision globale de la situation pour garantir équité et performance sur la durée.
- Être ouvert à la rencontre et à la co-construction, et ceci est valable pour le dirigeant comme pour le candidat ou l’équipe.
- Être congruent dans ses actes avec la promesse réalisée, l’expérience collaborateur.
Cet article est issu du podcast « Les Pratiques du Management », Aurélie Durand répond mensuellement aux questions de Frédérique Roseau, Rédactrice en Chef à la Revue Fiduciaire.